Comtesse de Ségur - Les Nouettes
Biographie de la Comtesse de Ségur.
"La modeste et douce bienveillance est une vertu qui donne plus d'amis que la richesse et plus de crédit que le pouvoir".
Sophie Rostopchine 3ème de cinq enfants, naquit le ler août 1799 à St-Petersbourg au Palais de l'Ermitage, où était logé son père Fiodor Rostopchine, favori du Tsar Paul 1er, qui l'avait anobli et avait accepté d'être le parrain de sa fille. Elle passa toute son enfance en Russie où son père fut lieutenant-général puis ministre des Affaires étrangères.
Quand Paul ler, devenu fou, fut assassiné en 1801, avec la complicité de son fils Alexandre ler, le comte Rostopchine se retira dans ses terres de Voronovo, à 60 verstes de Moscou, dans un empire de 40.000 hectares, 20.000 moutons, 1000 vaches, 200 chevaux et 4000 serfs. Rentré en faveur, il fut nommé par Alexandre ler, en 1812, Gouverneur de Moscou, après avoir été Grand Chambellan. Quelques mois plus tard, il prit la décision d'incendier la ville, le surlendemain de l'installation de Napoléon ler au Kremlin. Sophie fut très impressionnée par cet incendie et l'exode qui s'en suivit. On retrouvera, d'ailleurs, plusieurs épisodes d'incendies dans son oeuvre romancée.
La décision d'incendier Moscou fut fortement reprochée au Comte Rostopchine, en particulier par les propriétaires des plus belles demeures. Sa situation devint si inconfortable qu'il préféra en 1814 s'exiler en Pologne, puis en Allemagne et en Italie et enfin en France en 1 817. Il s'installa à Paris où sa femme, ses 3 filles et son dernier fils le rejoignirent à l'Hôtel Ney, Avenue Gabriel.
C'est dans le salon de Madame Swetchine, russe convertie au catholicisme, que les Rostopchine connurent Madame de Staël, Juliette Récamier, Chateaubriand et Benjamin Constant. Madame Swetchine qui avait connu les Ségur en Russie, présenta Eugène de Ségur à Sophie. Il en résulta un mariage de raison le 14 juillet 1819, les Rostopchine apportaient 1a fortune et les Ségur le Titre.
L'arrière grand-père d'Eugène avait été maréchal et ministre de la guerre de Louis XVI et le grand-père ambassadeur auprès de Catherine II. L'oncle, ancien aide de camp de Napoléon ler, était historien et académicien.
La mère de Sophie, née Catherine Protassov, ancienne demoiselle d'honneur de Catherine II, s'était convertie au catholicisme en 1807 et avait fait de Sophie une catholique à l'âge de 13 ans ce fut la seule parmi ses enfants. Sophie fut tyrannisée par sa mère qui lui refusait les vêtements chauds et nourriture suffisante, alors que les autres enfants paraissaient mieux traités. Le père, à l’inverse, adorait sa fille qui lui rendait bien.
La mère d'Eugène, née d'Aguesseau, était veuve depuis peu d'Octave de Ségur, dépressif, qui venait de mettre fin à ses jours en se jetant d'un pont dans la Seine, après une fugue d'un an.
Le jeune couple s'installa à l'Hôtel de Ségur, 48 rue de Varenne, où la mésentente régna vite entre belle-mère et belle fille, doublement étrangère, d'où leur départ dans un hôtel particulier, rue des Capucines, où Sophie prit son indépendance. La jeune Comtesse S'ennuie dans le milieu aristocratique du Faubourg Saint-Germain et entre en conflit avec son mari volage, désargenté et désœuvré. Il ne deviendra en effet Pair de France qu'en 1830, avec l'arrivée de Louis-Philippe.
Les seuls soutiens de Sophie sont le grand-père Louis-Philippe de Ségur et l’oncle historien qui ne mourra qu'à 93 ans, une année avant elle.
En 1822, le Comte Rostopchine acheta le château des Nouettes, près de l'Aigle dans l'Orne, et l’offrit à sa fille. le Comte mourut 3 ans plus tard, tandis que son épouse lui survivra plus de 30 ans. elle ne reviendra en France que durant quelques mois en 1838.
Sophie mit au monde huit enfants, d'abord quatre garçons puis quatre filles.
Le cas de la comtesse de Ségur montre qu’une vocation très tardive d’écrivain peut être particulièrement réussie : elle a en effet écrit son premier livre à cinquante-huit ans.
On raconte que la comtesse de Ségur a commencé à se consacrer à la littérature pour enfants quand elle a écrit les contes qu’elle racontait à ses petits-enfants et qu’elle les a regroupés pour former ce qui s’appelle aujourd’hui "Les nouveaux contes de fées". Lors d’une réception, elle lut quelques passages à Louis Veuillot pour calmer l’atmosphère qui était devenue tendue. C’est ce dernier qui réussira à faire publier l’œuvre chez Hachette.
Dans son écriture la Comtesse s'avère à la fois bonne psychologue et moraliste. Elle crée des personnages de confidentes (les bonnes surtout) de raisonneuses et de bouffons, ses portraits d'enfants sont particulièrement réussis. Les portraits d'adultes sont humoristiques, cruels ou caricaturaux. L'auteur réalise une véritable fresque de la société du Second Empire. Elle a le goût de la fête et nous décrit les noces de campagne, les dîners, les visites des châtelains voisins, les goûters, les parties de pêche et les courses d'ânes. Elle est aussi moraliste et prône une morale chrétienne (la charité, la foi en Dieu omniprésent, l'espérance en un monde meilleur, l'obéissance aux commandements de Dieu) d'où le souci de l'éducation des enfants sans rigueur exagérée et sans contrainte, en obtenant leur adhésion.
La Comtesse a trouvé chez Louis Hachette un grand éditeur et fut le meilleur auteur de la Bibliothèque Rose. De grands dessinateurs et graveurs illustrèrent avec talent ses ouvrages, le plus connu étant Gustave Doré.
Sophie fait preuve d'une énergie à toute épreuve, véritable chef de clan gérant son domaine normand, enseignant elle-même ses filles et les aidant ensuite dans leur vie de mères de famille. C'est aussi une femme d'affaires, discutant pied à pied avec ses éditeurs, d'abord Louis Hachette, puis son gendre et successeur Emile Templier, réclamant des avances d'argent pour chaque nouveau livre et obtenant des augmentations de plus en plus substantielles. Elle a besoin d'argent pour assurer son train de vie et réussira à obtenir son émancipation financière, chose rare à l'époque. les rapports avec ses éditeurs ne sont pas seulement d'ordre financiers. En effet, elle doit lutter pour que ses écrits ne soient pas dénaturés, refusant d'adoucir certains passages qui ne sont, pour elle, que l'image de la vie. Elle ne réussit pas toujours : c'est ainsi quelle a dû situer en Angleterre "Le Bon petit diable", car le climat des pensionnats n'était pas "politiquement correct" pour la maison Hachette
Polyglotte, parlant cinq langues depuis l'âge de 6 ans, la Comtesse a présenté souvent un comportement hystérique avec crises de nerfs et longues phases d'aphonies, l'obligeant à correspondre avec son entourage a l'aide de sa célèbre ardoise. durant plusieurs épisodes de graves dépressionsse situant entre 1836 et 1849.
En 1872, Sophie vend les Nouettes qui après plusieurs changements de propriétaires, deviendra un Institut médico-éducatif. Elle se retire à Paris, rue Casimir Perier, où elle mourut en 1874 à 75 ans. Elle fut enterrée dans le Morbihan, à Pluneret, près de son avant dernière fille Henriette, habitant le château de Kermadio, tandis que son cœur était déposé à la chapelle des visitandines.
Les Nouettes sa demeure.
Après son mariage, Sophie de Ségur habite à Paris, rue de Varenne, mais ne s'y plaît guère. Heureusement, elle séjourne parfois chez des amis, dans la campagne ornaise, à Chandai près d'Aube. C'est alors qu'on lui signale une propriété à vendre, les Nouettes à Aube. Son père s'en porte acquéreur en juin 1821 pour la somme de 80 000 francs, et lui en fait cadeau.
D'une superficie de 72 hectares, le domaine comprend, une maison d'habitation sympathique, accueillante, avec cour et jardin de maître. Il y a aussi les maisonnettes du concierge et du jardinier, ainsi qu'une ferme, des prairies et des bois. Le parc est planté d'arbres vénérables. Retrouvant l'atmosphère du domaine de Voronovo en Russie, où elle a grandi, l'éxilée de la rue de Varenne récupère du même coup son entrain.
Elle s'attacha avec passion à son domaine, au point d'y passer le plus de temps possible, pendant que son mari n'était que trop heureux de retrouver Paris. Bientôt la grande maison résonne des rires et des cris des huit enfants Ségur. On y invite la famille, les amis, puis les gendres et les belles filles. L'hospitalité des Nouettes, à l'image de la maîtresse des lieux, est spontannée, génreuse et attentionnée.
Depuis 1930, propriété du département de l'Orne, le château des Nouettes abrite aujourd'hui un Institut médico-éducatif. Il ne se visite que sur autorisation spéciale. C'est l'ancien presbytère, à l'ombre de l'église d'Aube, qui abrite le musée consacré à la Comtesse de Ségur, mis en place par l'Association des Amis de la Comtesse de Ségur, dont font partie les déscendants de la Comtesse. Chaque année, en dehors des salles permanentes du musée, une exposition est consacrée à la présentation d'un roman de la Comtesse. Le musée lui même, est entièrement structuré autour de ses oeuvres. Une première salle est consacrée à ses origines russes qu'elle a elle-même évoquées dans l'un des ses livres les plus connus : "les Malheurs de Sophie". On peut y voir des portraits de sa famille et des objets caractéristiques de la vie russe de cette époque. La 2ème salle est dévolue à la famille de l'écrivain qui a aussi été sa grande source d'inspiration 8 enfants et beaucoup de petits-enfants. Trois autres salles servent de cadres à des expositions temporaires. Tout est mis en oeuvre afin de découvrir (ou plus sûrement re-découvrir) l'univers poétique et enfantin de l'écrivain.
La Comtesse de Ségur, une femme d'exception.
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